Vers une société de partage : Le pair a pair

//Vers une société de partage : Le pair a pair

Vers une société de partage : Le pair a pair

L’ECHANGE DE PAIR A PAIR VIA DES OUTILS NUMERIQUES EN OPEN SOURCE :

L’AVENIR DE NOTRE MONDE ?

Un changement de civilisation : La transformation des modes d’échange

Nous sommes en train de vivre un véritable changement de civilisation avec la révolution technologique « Internet » engagée depuis le début des années 1980 dans la société civile.

Le monde en pleine transformation numérique génère des crises de diverses natures dont la principale est sociétale et identitaire : comment puis-je m’intégrer dans le monde du travail, transformé en profondeur par l’automatisation et la numérisation de tous les processus, dans l’entreprise où c’est la machine qui crée la valeur ? Quel sens puis-je donner à ma vie quand je dois trouver un emploi couvrant parfois à peine mes besoins ? Comment m’adapter à cette société, particulièrement quand je suis issu d’une génération née bien avant cette transformation ?

Michel Bauwens[1], dans son ouvrage Sauver le Monde (2015-Editions Les Liens qui Libèrent) pose les constats issus d’une étude[2] de l’Institut Bruegel pour l’Oxford Martin School, publiée en 2014. Il annonce qu’au cours des vingt prochaines années, l’automatisation va provoquer le déclin de la société fondée sur le salariat. En effet, 49% des emplois devraient disparaître aux États-Unis et entre 43% et 56% en Europe.

Cette profonde transformation constitue l’horizon de la thèse de Michel Bauwens qui étudie et promeut un nouveau modèle de production rendu possible lui aussi par le numérique et fondé sur les relations de « Pair à Pair » ou « Peer to Peer » (P2P : Voir le site de la Fondation). Il s’agit de la capacité des gens à créer de la valeur en tant qu’égaux, sans être obligés de demander une autorisation. Le sens initial du P2P concerne le partage de fichiers, comme par exemple de la musique créée par d’autres.

Ainsi, le numérique ne repose plus sur un modèle d’opposition fonctionnelle entre production et consommation mais sur la constitution de communautés de savoirs (vivre, faire, théoriser), élaborées à travers les relations « pair à pair ». On assiste à une profonde dégradation de la cohésion sociale des sociétés industrielles et des effets ravageurs sur les sociétés encore en marge de l’industrialisation. Rien n’est fait pour y remédier à brève échéance et ces dégradations ne feront que s’emballer telle une incontrôlable réaction en chaîne. Pour Michel Bauwens, le passage à une véritable économie de « pair à pair » est inéluctable à terme car seuls les savoirs sont producteurs de nouvelles potentialités et seule une organisation sociale fondée sur leur valorisation permettra de réguler les réactions en chaîne et de sauver le monde. « Le système actuel fondé sur le salariat issu du fordisme et l’automatisation massive va engendrer une insolvabilité systémique et conduire à un effondrement du capitalisme consumériste ».

Cela nécessite de redessiner un nouveau modèle de redistribution des immenses gains de productivité rendus possibles par l’automatisation avec, pour matrice d’organisation du travail entre pairs, le modèle de contrat des intermittents du spectacle (1936) et du logiciel libre (revenu contributif).

Emergence d’une économie de partage : les commons

Michel Bauwens précise qu’à des moments où tout est figé, sur les plans national et international, seul le niveau local permet encore des avancées réelles. Ainsi, depuis le début du XXIe siècle, plus de la moitié de la population habite dans les villes. Se sont alors développés « les mécanismes de Peer to Peer par lesquels un nombre croissant de gens prennent leur destin en main en lançant de nouveaux projets à l’intérieur d’un cadre institutionnel avec lequel ils entrent en conflit ». Il affirme que « face au pessimisme du monde politique, il y a l’optimisme de la science et du Peer to Peer. C’est pourquoi les solutions viendront de la société civile ».

Le Peer to Peer est considéré comme une révolution de la productivité humaine où chaque individu, en tant que citoyen, peut contribuer bénévolement et sans contrainte à l’amélioration de logiciels partagés. Ainsi, Michel Bauwens le considère comme « l’idéologie de la nouvelle classe de travailleurs de la connaissance pour qui il équivaut au socialisme de la classe ouvrière industrielle du XIXe siècle ».

Le modèle du Peer to Peer s’inspire de l’Open Source[3] et « contourne la logique de fausse abondance matérielle et de rareté artificielle de l’immatériel ». Dans les phénomènes nouveaux tels que l’économie collaborative, les réseaux Peer to Peer, l’Open Source, le crowdfunding, les fablabs, les micro-usines, le mouvement des makers, l’agriculture urbaine, il entrevoit « un modèle qui nous mène vers une société post-capitaliste où le marché doit enfin se soumettre à la logique des commons ». Une intelligence collective au service du bien commun.

L’économie collaborative récente a ainsi pu émerger grâce au phénomène Peer to Peer, de même que les outils développés dans le domaine de la participation en démocratie.

Loin de bannir capitalisme et politique, Michel Bauwens indique que la production entre pairs doit maintenant se lier d’une manière ou d’une autre au capital, du moins jusqu’à l’émergence d’un système alternatif : un système communautaire ouvert faisant alliance avec un Etat partenaire tout comme avec l’Entreprise. Il entrevoit ainsi un système hybride ayant plus de chances de réussir, comme cela a pu se réaliser entre Linux, système ouvert, et IBM ayant intégré ces équipes en son sein.

Ainsi, il souligne que l’internet permet de dynamiser des petits groupes à l’échelle mondiale avec des individus pouvant apporter de petites contributions aux communs numériques qu’ils utilisent en échange. La devise est donc : « Apportez une pierre, vous obtiendrez un édifice ! »

De la même façon, pour Jeremy Rifkin[4], nous assistons à l’éclipse du capitalisme[5]. Dans son ouvrage La Nouvelle Société du coût marginal zéro paru en 2014, il traitait de la même façon le basculement inévitable vers un nouveau système de production et de consommation nommés les communaux collaboratifs.

 

[1] Cyber-philosophe belge, théoricien du Peer to Peer (P2P), il figure parmi les 100 personnalités (82e) les plus influentes du monde d’après la liste du Post Growth Institute, groupe international de scientifiques militant pour une société durable où la prospérité serait créée sans besoin de croissance économique.

[2] http://www.oxfordmartin.ox.ac.uk/downloads/academic/the_future_of_employment.pdf

[3] Développement de logiciels dont le code source est ouvert et donc gratuit pour le grand public.

[4] Essayiste américain, spécialiste de prospective. Il a conseillé plusieurs personnalités politiques.

[5] http://www.challenges.fr/economie/conjoncture/jeremy-rifkin-le-capitalisme-va-devoir-vivre-avec-l-economie-collaborative_57405

[6] 1e révolution : la vapeur d’eau permet de passer de l’information (imprimerie) à la communication (transport). 2e révolution : moteur à combustion et électricité transforment les modes de consommation de la société.

[7] http://www.telerama.fr/idees/jeremy-rifkin-ce-qui-a-permis-le-succes-inoui-du-capitalisme-va-se-retourner-contre-lui,117006.php

[8] http://www.latribune.fr/opinions/tribunes/de-l-economie-du-partage-a-la-democratie-du-partage-618852.html

Une révolution technologique et sociétale : Vers une économie du partage ?

Cette troisième voie, au-delà du capitalisme ou du socialisme, est rendue possible par la troisième révolution industrielle[6]. C’est l’internet qui nous y a fait entrer : « un nouveau monde émerge, dynamisé par les réseaux sociaux, l’innovation et la culture du partage[7] ». Pour lui, une troisième révolution industrielle est la seule solution mondiale pour éviter une nouvelle crise énergétique et économique.

Nous voyons concrètement émerger de la société civile une « économie de partage » (collaborative) rendue possible par le concept des commons. Ceux-ci ont permis la création d’outils dans le domaine de la Civictech pour accéder à une « démocratie de partage », selon la formule de Pierre Godin, haut fonctionnaire européen[8].

Michel Bauwens rappelle les principes des cycles longs économiques de Kondratiev qui nous placent aujourd’hui dans le sixième cycle, celui de l’informatique, qui a débuté en 1971.

En 2011, le Forrester Research a résumé un siècle d’évolutions industrielles et commerciales en quatre grandes phases commençant au début du XXe siècle. Depuis 2010, nous sommes entrés dans l’ère du Client first et plus précisément de l’Utilisateur first (complétant la notion d’expérience utilisateur à explorer finement ou UX en anglais pour User Experience), c’est-à-dire un utilisateur ayant un accès direct à l’information, à la consommation connectée et à sa propre production de partage de solutions.

Nous sommes donc entrés dans l’ère de l’information accessible et partagée. Deux systèmes de transmission de l’information et de gouvernance des structures cohabitent : un système vertical de descente d’information (Top-Bottom) et celui, horizontal, des individus en interconnexion directe.

Il s’agit bien d’une révolution puisqu’un retour en arrière ne serait pas envisageable au regard des produits et services créés à partir du numérique depuis trente-cinq dans la société civile.

By | 2017-08-20T18:11:22+00:00 août 20th, 2017|DANS LA CITE|0 Comments

About the Author:

Leave A Comment